Le comité chargé d’évaluer les ordonnances Macron a rendu, fin 2021, son rapport, plutôt négatif. Depuis aucune mesure n’a été envisagée pour les modifier.
Pourtant, les ordonnances établies en 2017 ont complètement bouleversé l’écosystème des relations sociales et des contentieux du travail. La CFTC livre ses constats et son appréciation, sur des mesures qui accordent toute latitude aux employeurs dans leurs négociations
Contentieux limités
L’introduction d’un barème sur les indemnités de licenciement sans cause réelle et sérieuse a plus impacté le nombre de contentieux des salariés qui gagnent moins de 3 000 euros bruts et ont moins de 5 ans d’expérience, que ceux de l’encadrement ou à l’initiative des employeurs. Ces salariés hésitent désormais à faire valoir leurs droits en cas de licenciement abusif.
Le nombre d’affaires nouvelles aux Prud’hommes a drastiquement chuté, passant de 205 770 en 2005 à 102 696 en 2020.
Le plafonnement des indemnités (10 500 € soit 3,5 mois de salaire pour deux ans d’ancienneté et 18 000€ pour 5 ans) a fait reculer le recours à des avocats. Pour contourner ce plafonnement, il reste la valorisation des heures supplémentaires, notamment pour les cadres en forfait jours, la reconnaissance du harcèlement moral, les dommages et intérêts pour procédures vexatoires ou violation de l’obligation de sécurité.
Les dossiers, plus complexes, nécessitent plus de temps et de conseil. Des start-ups proposent en ligne le règlement des litiges et encouragent la tendance à la transaction.
Accords d’entreprise à la carte
Aux 9 000 accords conclus en 2020 par des élus du CSE ou des salariés mandatés, s’ajoutent 5 000 référendums ratifiés aux deux tiers. L’employeur choisit désormais le niveau de la négociation (au niveau du groupe, de la société, du métier) et les signatures d’accords se font à la carte.
Au sein des entreprises, des dispositions moins-disantes que celles des conventions collectives ou les dispositions de la loi lorsqu’elles sont supplétives voient le jour, comme sur le temps de travail.
Les syndicats commencent à se saisir des nouvelles dispositions du dialogue social pour être plus exigeants sur le respect des procédures, l’accès aux informations et les délais de consultation. Ceux qui explorent les nouveaux champs d’actions de la négociation s’en sortent mieux.
Mandats en baisse dans les Comités Sociaux et Economiques
90 000 CSE ont été élus, représentant 11 millions de salariés. Dans 45 000 entreprises (1,3 million de salariés), la désignation n’a pu se faire. La Direction générale du travail et la DARES devraient chiffrer la baisse des mandats en 2023 entre 30 et 40%.
La fusion des instances DP, CE et CHSCT au sein du nouveau CSE a réduit les sièges et le nombre d’élus. En rationnalisant les périmètres, en gardant la main sur l’implantation des Représentants de Proximité, les entreprises ont réduit le coût du dialogue social, recentré les échanges au niveau des sièges sociaux… et modifié le rapport de force.
Les réunions de CSE traitent de tous les sujets sur plusieurs jours. Dans certaines entreprises, les négociations ont tourné à la concertation.
La limitation du nombre de mandats (3 maximum soit 12 ans), dans un contexte de faible reconnaissance des acquis professionnels syndicaux et d’augmentation de l’âge moyen des élus, affecte les vocations. Des cursus universitaires de dialogue social sont ouverts aux ex-mandatés, mais les possibilités de reconversions professionnelles restent rares.
Beaucoup d’enseignements étaient à tirer du bilan de ces ordonnances, comme sur l’état de santé de nos mandatés et élus, archi-polyvalents, sur des territoires de plus en plus étendus. Seule mesure, Élisabeth Borne, ministre du Travail, a prévu un plan d’accompagnement appuyé sur les ARACT (Associations régionales pour l’amélioration des conditions de travail) pour les sujets de santé et sécurité au
travail et sur les observatoires départementaux du dialogue social pour le deuxième round d’élections des CSE… qui commence cette année même !
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